Manifestation anti-mariage gay : entre incidents et mobilisation décevante, Civitas rate le coche

 

Manifestation anti-mariage gay : entre incidents et mobilisation décevante, Civitas rate le coche

Cela devait être le grand rendez-vous de l’extrême droite catholique.Annoncée il y a trois mois par l’institut Civitas, mouvement intégriste proche de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X, la « grande manifestation nationale » du dimanche 18 novembre à Paris a réuni plusieurs milliers de personnes. Une mobilisation certes importante, mais bien en deçà de celle des manifestations de la veille, appelées par une dizaine d’associations, moins marquées politiquement et qui bénéficiaient du soutien tacite des autorités catholiques. En effet, les manifs du samedi avaient, entre autres, pour but de ne pas laisser le champ libre à Civitas. Sur ce point, elles ont parfaitement rempli leur rôle.

Manifestation anti mariage gay, du dimanche 18 novembre. DR.

Le défilé de Civitas « contre l’homofolie » s’est ainsi résumé à une grande réunion des familles de l’extrême droite. De l’Action Française au Mouvement national républicain (MNR, ex-formation de Bruno Mégret) en passant le Parti de la France de Carl Lang, le Renouveau Français, de la Renaissance catholique, l’Alliance Royaliste ou encore de quelques militants du GUD. L’on remarquait aussi le chanteur du groupe de rock Hotel Stella, membre du Bloc identitaire. Il y avait aussi un petit cortège d’une vingtaine  de personnes des Jeunesses nationalistes qui détonnaient fortement, avec leur look skinhead, du reste des manifestants.

Plus surprenant, plusieurs personnalités du FN avaient fait le déplacement « à titre personnel ». Comme la vice-présidente du FN, Marie-Christine Arnautu, Alexandre Simonnot, Cyril Bozonnet et Jean-Marc de Lacoste-Reymondie, Gonzague Malherbe, ancien candidat à la législative de la 12e circonscription de Gironde, ainsi que quelques militants FNJ franciliens. Selon Mme Arnautu, Bruno Gollnisch et Gilbert Collard devaient aussi venir. Marine Le Pen n’a pas souhaité que le FN appelle en tant que tel à participer aux manifestations anti-mariage homosexuel. Elle a en revanche laissé la liberté à ses militants d’y aller ou pas.

M. Gollnisch avait déjà fait la manifestation du samedi, où s’étaient signalés plusieurs élus parisiens de l’UMP, comme Bernard Debré ou Claude Goasguen. Le député du Vaucluse Jacques Bompard a lui aussi fait les deux manifestations. Il était dimanche en tête du cortège.

Incidents

Les manifestants ont défilé aux abords du ministère de la famille, dans le 7e arrondissement de Paris,  scandant notamment : « Première, deuxième, troisième génération, nous sommes tous des enfants d’hétéros« , « La France veut du boulot, pas le mariage homo » et « Hollande, entends-tu, la France est dans la rue ».

En marge de la manifestation de dimanche, des incidents ont eu lieu. Des militantes du mouvement féministe ukrainien Femen et des journalistes, parmi lesquels Caroline Fourest, ont été pris à partie et certains « roués de coups » lors de cette manifestation. « Une dizaine de militantes des Femen avaient décidé de faire une protestation pacifique et drôle, d’arriver habillées en nonnes avec des slogans humoristiques, et quand elles se sont avancées vers les manifestants, des types les ont pris en chasse, déchaînés », a raconté Mme Fourest. « Les filles ont pris des coups dans toutes les parties du corps », ainsi que des journalistes qui les avaient filmées. Des photographes ont été « molestés », a également rapporté un photographe de l’AFP.

Le bilan pour Civitas dimanche soir est donc mitigé. Ses membres ont consacré beaucoup de moyens financiers (1 million de tracts imprimés) pour organiser une démonstration de force qui n’a pas eu lieu. C’est donc une occasion ratée pour la direction remaniée du mouvement intégriste de marquer son arrivée avec un succès.

En effet, Jean-Claude Philipot, ex-commissaire général de l’armée de terre, a été promu n°2. M. Philipot, il y a quelques années, était délégué général de Dies Irae, petite formation d’extrême droite catholique girondine dont les méthodes militarisantes connurent un certain succès médiatique. L’ancien officier d’Etat major Dominique Chrissement a pris la direction de la revue de Civitas. Il était auparavant secrétaire général du mouvement.

Alain Escada, quant à lui, est devenu président de Civitas, remplaçant le très âgé amiral François de Penfentenyo. M. Escada résume son parcours ainsi : « Né à Bruxelles, c’est là que j’ai commencé à militer. J’ai eu le privilège, très jeune, d’être formé par le lieutenant-général Emile Janssens, dernier commandant en chef de l’armée coloniale belge, puis rédacteur auprès de nombreuses publications catholiques en Europe et qui avait connu des personnalités comme Mgr Lefebvre[évêque schismatique, fondateur de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X] et Salazar[ancien dictateur portugais]. »

Il faut préciser que Civitas privilégie deux canaux de recrutement : les militaires de haut rang, comme on vient de le voir, et les chefs d’entreprise.

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En bref et en vrac

Manifestations de samedi : à Lyon, le cortège de samedi s’est caractérisé par une forte présence de militants d’extrême droite, toutes obédiences confondues. Alexandre Gabriac et ses troupes ont ainsi investi le toit de l’office de tourisme, place Bellecour. Ils ont été interpellés.

A Paris, était présent dans le cortège Camel Bechikh, président de Fils de France, qui veut s’adresser aux « Français patriotes de confession musulmane ». M. Bechikh, contributeur du site de Robert Ménard, avait assisté au congrès du FN à Tours en janvier 2011. A noter aussi la présence de l’ancien cadre du FN Jean-Claude Martinez.

Manifestation de dimanche : Yvan Benedetti, président de l’Oeuvre française et mentor d’Alexandre Gabriac, a expliqué sur son compte Twitter ne pas avoir pu se rendre à la manifestation de Civitas « en raison de son contrôle judiciaire » qui lui interdirait de se rendre dans la capitale.

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